Qu'est-ce que le taux d'usure ?

Le taux d’usure fait la Une des médias spécialisés dans l’immobilier depuis quelques semaines. Pourquoi ? Il serait responsable de nombreux refus de prêts immobiliers pour des acheteurs au dossier de financement pourtant solide. IMOP vous dit tout sur le taux d’usure en 2022, sur son mode de calcul et sur les enjeux actuels pour le marché immobilier. 

20 septembre 2022

Le taux d’usure, qu’est-ce que c’est ? 

Le taux d’usure définit un taux maximum au-dessus duquel les banques ne peuvent accorder un prêt immobilier. C’est donc une protection accordée aux emprunteurs,  personnes physiques, afin d’éviter des prêts usuraires. 

La Banque de France définit chaque trimestre le taux d’usure en se basant sur les crédits décaissés au trimestre précédent (qui ont donc été négociés 2 ou 3 mois plus tôt…). La Banque de France ajoute un tiers au taux effectif moyen pratiqué par les établissements bancaires. Elle établit différents taux d’usure par types de prêts et par durée d’emprunt. 

Par exemple, depuis le 1er juillet 2022, le taux d’usure est de 2,57 % pour un crédit immobilier de plus de 20 ans et de 2,6 % pour un crédit immobilier de moins de 20 ans. 

De nombreux voisins européens ont aussi un taux d’usure pour protéger les citoyens. Toutefois, dans de nombreux pays, le mode de calcul est différent et le taux d'usure est nettement plus élevé. 

Le taux d’usure en 2022 : pourquoi pose-t-il problème ? 

Les taux d’intérêt pour les prêts immobiliers étaient historiquement bas depuis plusieurs années. Les acheteurs de biens immobiliers étaient ravis d’emprunter autour de 1 %. Hélas, le contexte économique a conduit les taux immobiliers à remonter ces derniers mois. Ce n’est pas dramatique : emprunter à 2 % quand l'inflation avoisine 6 % reste une bonne opération. Souvenez-nous qu’il y a une quinzaine d’années, on empruntait à 3,5 % ! 

Depuis le printemps 2022, les professionnels de l’immobilier et du crédit constatent de nombreux refus de prêts en raison du taux d’usure. Ce phénomène s’accentue au fil des semaines et le secteur utilise les médias pour se faire entendre de la Banque de France et du ministère de l’Économie et des Finances.

Le marché immobilier pourrait connaître une fin d’année compliquée et la prochaine révision du taux d’usure au 1er octobre 2022 était à ce titre très attendue. Le taux d'usure a ainsi été relevé de 0,48 point pour atteindre 3,05 % pour les emprunts de 20 ans et plus, les banques vont pouvoir revoir leurs barèmes à la hausse et ainsi accepter des dossiers d'emprunteurs qui auraient été refusés quelques jours plus tôt. Certains dossiers de prêt, jusqu'ici refusés en raison du taux d'usure déconnecté des taux immobiliers, seront validés. Certains courtiers estiment toutefois que cette accalmie sera de courte durée compte tenu de l'évolution continue à la hausse des taux. En clair, le taux d'usure va rester fixé à 3%, tandis que les taux immobiliers, eux, vont continuer à augmenter. Résultat, de nombreux dossiers pourraient encore être refusés dans les mois à venir. De plus, le crédit devient plus cher : le taux d'usure reflète en partie les taux pratiqués par les banques. En augmentant, le coût du crédit, lui, devient mécaniquement plus élevé

Pour comprendre, il faut revenir au mode de calcul du taux d’usure : il génère un décalage de 6 mois minimum entre le taux négocié actuellement et le taux moyen qui sert de base de calcul. Certains professionnels militent donc pour une révision mensuelle du taux d’usure. Cela éviterait que les emprunteurs ne se retrouvent pris dans un effet ciseau en période de remontée des taux de crédit immobilier. 

Autre problème : le taux d’usure se compare au TAEG (Taux annuel effectif global). C’est la taux global remis par les banques qui permet à l’emprunteur de pouvoir comparer facilement différentes offres de prêt immobilier. 

Or, le TAEG prend en compte : 

  • non seulement le taux du prêt immobilier ou taux nominal, 
  • mais aussi tous les frais annexes comme les frais de dossier prélevés par la banque, 
  • les frais de courtage,
  • l’assurance emprunteur,
  • les frais de garantie. 

Oui, mais l’assurance emprunteur varie d’un acheteur à l’autre en fonction : 

  • de son âge, 
  • des risques professionnels ou personnels, 
  • de son état de santé. 

Ainsi, un emprunteur présentant un risque ou un certain âge verra automatiquement son assurance emprunteur augmenter dans le TAEG. Les professionnels du crédit immobilier alertent depuis cet été sur les difficultés à obtenir un prêt pour financer un projet d’achat immobilier dès que l’on a plus de 45 ans ! 

Pas besoin de faire un dessin pour montrer l’effet des refus de prêts sur le marché immobilier. Dans les compromis de vente, une clause suspensive d’obtention du crédit immobilier est en général présente. Simple formalité ou réel risque de voir un grand nombre de ventes immobilières capoter ? 

Comment acheter un bien immobilier en dépit du taux d’usure ? 

En premier lieu, le rôle de l’agent immobilier se renforce. Non seulement il doit estimer le meilleur prix de vente pour un bien immobilier, mais il doit désormais estimer le meilleur acheteur ! 

En effet, lors de ses nombreuses discussions avec un acquéreur potentiel, lors de négociations autour de l’achat, l’agence immobilière doit maintenant identifier le risque de refus de prêt immobilier. Car, qui dit refus de prêt, dit absence de commissions pour l’agent immobilier et absence de vente pour le propriétaire. Tout le monde revient à la case départ et recommence tout le processus. C’est l’ensemble du marché immobilier qui va se trouver dans les prochains mois dans une situation complexe. 

Pour le vendeur, cette difficulté à obtenir des prêts immobiliers alors même que le dossier de financement est correct, doit conduire à s’interroger en cas d’acquéreurs multiples : lequel a le plus de chances d’obtenir un financement ? 

Côté acheteur, il existe des solutions pour contourner le taux d’usure et parvenir à financer son projet d’acquisition immobilière

  • Négocier son assurance emprunteur au plus bas en faisant jouer la concurrence.  
  • Étudier l’intérêt de recourir à un prêt à taux variable, dont le taux nominal est plus bas au démarrage qu’un taux fixe. Toutefois, attention de bien encadrer les possibilités d’augmentation du taux au fil du temps. 
  • Emprunter sur une durée la plus courte possible : les taux proposés par les banques sont plus bas lorsque la durée d’emprunt est courte. Pour cela, l’acheteur mobilisera plus d’épargne ou fera appel à des prêts aidés comme le prêt à taux zéro. 
  • Acheter via une SCI (société civile immobilière) et non pas en nom propre : le taux d’usure ne s’applique qu’aux emprunteurs personnes physiques. Attention aux risques à long terme sur la plus-value à la revente, l’obtention de prêts aidés, etc. 

Vous l’avez compris, emprunter devient de plus en plus difficile actuellement mais demeure intéressant dans le contexte inflationniste. Chaque partie prenante dans une transaction immobilière, acheteur mais aussi vendeur et agent immobilier, doit s’intéresser à l’actualité immobilière pour maîtriser les enjeux et prendre les bonnes décisions.